Situé dans le 11ème arrondissement parisien, l’artifexlab est un lieu hybride qui fusionne création numérique, galerie d'art et bar à cocktails. Au programme de ce mois de novembre : "Corrupt", une exposition qui infecte volontairement une IA pour observer sa descente aux enfers.
Le laboratoire de l’IA
Artifexlab débarque avec une proposition simple : montrer que l'intelligence artificielle n'est pas qu'une affaire de prompt et de résultats parfaits. C'est avant tout un outil créatif, avec ses forces et ses failles.
Le lieu de 130 m² mélange les genres sans complexe : galerie d'exposition, bar à vins nature, atelier de formation et même studio d'enregistrement. L'idée ? Démystifier ces technologies en les rendant accessibles, tangibles, presque conviviales.
Derrière le projet, trois profils complémentaires. Neb(sh), pionnier français de la vidéo générative par IA, qui a notamment signé des clips pour Bigflo & Oli ou Michel Polnareff. Benjamin Rittner, producteur aguerri du spectacle vivant après 15 ans chez Asterios. Et Yann Rusconi, entrepreneur culturel qui structure l'ensemble. Leur pari : transformer l'IA en sujet de conversation plutôt qu'en menace abstraite.
"Corrupt" : l’IA sabotée
Corrupt, l'exposition qui ouvre ce 5 novembre, pousse la logique de l’empoisonement d’IA jusqu’au bout.
Les artistes Washmachine.wm et Lilien Auger, accompagnés du sound designer Veil, ont délibérément injecté un virus dans une IA générative. Pendant cinq jours, ils ont laissé le code se dégrader, enregistrant minute par minute cette descente progressive vers le chaos.
Le principe technique est assez radical : au lieu de peaufiner les paramètres pour obtenir des images cohérentes, ils ont corrompu l'espace latent de l'IA — cette zone abstraite où le modèle "pense" avant de générer une image. Résultat : l'IA s'enferme dans des boucles obsessionnelles, produit des formes fragmentées, perd peu à peu sa capacité à créer quoi que ce soit de reconnaissable.
Ce qui aurait pu rester une expérience purement technique devient une métaphore visuelle saisissante. L'IA malade reflète nos propres travers : l'épuisement numérique, les algorithmes qui s'enferment dans leurs bulles, la technologie qui déraille quand on la pousse dans ses retranchements. La question posée est finalement très humaine : est-ce l'outil qui corrompt, ou bien l'usage qu'on en fait ?
L'exposition condense ces cinq jours d'agonie virtuelle en une heure de montage vidéo, quelque part entre expérimentation générative et cauchemar audiovisuel.
Pas besoin de maîtriser les subtilités des modèles de diffusion pour saisir l'enjeu : on assiste à une machine qui perd pied, et ça dit beaucoup sur notre relation actuelle à ces technologies.
Un lieu qui se vit autant qu'il s'observe
Artifexlab ne mise pas uniquement sur les expositions. Le lieu propose une carte de cocktails signatures conçue par un mixologue résident, une sélection pointue de vins bio en direct de vignerons indépendants, et même des huîtres tous les dimanches matin. L'idée est de créer un espace de discussion où l'art ne reste pas coincé derrière une cimaise, mais circule entre les verres et les conversations.
Les résidences d'artistes fonctionnent par cycles mensuels : deux créateurs investissent le lieu avec accès aux outils de production (imprimantes 3D, logiciels génératifs, matériel audiovisuel). Les œuvres qui en sortent sont exposées sur place, parfois vendues, toujours accompagnées de rencontres avec le public.
Pour "Corrupt", le vernissage se déroulera de 19h à 20h avec un buffet d'huîtres — manière assumée de mélanger contemplation artistique et plaisir gastronomique. Le lieu est ouvert du mercredi au dimanche, avec des horaires qui s'adaptent à l'usage bar-galerie : de 17h à minuit en semaine, dès 14h le samedi et 11h le dimanche.
Artifexlab — 10 rue de la Vacquerie, 75011 Paris — artifex-lab.com
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